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Témoignages: 4 femmes nous racontent leur coming out

Par Justine Leupe

Qu’elles l’aient toujours su ou découvert sur le tard, révéler leur homosexualité a été pour ces femmes un tournant. Certaines ont été confrontées à un entourage bienveillant, d’autres y ont perdu des plumes, mais toutes se sont dévoilées telles qu’elles étaient vraiment.

Dans une société hétéronormée, faire son coming out est une réelle étape! Avant ce grand saut, certaines se sont posé mille et une questions, de peur de décevoir, de sortir de ce que certains appellent la “normalité” ou encore de peur de quitter un quotidien fait de mensonges dans lequel elles étaient ancrées depuis toujours. Libres et heureuses, quatre femmes nous racontent leur coming out.

Lara, 25 ans: “Ma mère m’a dit que j’allais changer”

Lara a toujours su qu’elle était lesbienne, mais elle a mis quelques années avant de mettre des mots sur ce qu’elle éprouvait. “C’est vers l’âge de 3 ans que j’ai compris, notamment parce que j’étais fascinée par ma maîtresse. Mais je n’ai pas conceptualisé ce que je ressentais avant 14 ans”. Du reste, la jeune fille garde ses pensées pour elle: “J’étais fille unique et j’avais seulement une cousine, qui elle aussi était lesbienne. Deux dans la famille, ça allait être un peu trop”.

Deux ans plus tard, Lara finit par se confier à une amie sur son orientation lors de la Gay Pride: “On y allait vraiment pour s’amuser et c’est sorti d’un coup, je lui ai dit que j’étais bisexuelle. À l’époque, je ne me considérais pas comme lesbienne, car il y avait peu de représentation de lesbienne hyper féminine, ce qui est mon cas. J’ai toujours adoré me maquiller, mettre du vernis, avoir de longs cheveux, alors que l’image de la lesbienne était plutôt celle d’un garçon manqué. Je me disais donc que je devais être bisexuelle. Nous vivons dans une société hétéronormée avec des clichés prédominants, et je me disais que si j’étais lesbienne, je devrais me couper les cheveux”.

La phrase qui a fait l’effet d’une bombe

Ce n’est que plus tard que la jeune fille, alors étudiante, fera son coming out. “J’avais 20 ans, j’étais en deuxième année à l’université et pour un travail de groupe, nous devions réaliser un reportage radio sur Tinder. On s’est inscrits sur l’application et je suis allée jeter un œil du côté des filles. J’ai commencé à discuter avec l’une d’entre elles, on s’est rencontrées, on s’est mises ensemble mais cela n’a pas duré. J’étais triste, c’était ma première copine. Avant, j’avais eu des petits copains, mais c’était pénible…”.

Lara vit mal la rupture. “Ma maman avait remarqué que quelque chose n’allait pas, que j’étais déprimée et elle s’inquiétait pour moi. Je lui ai donc dit que c’était à cause d’une rupture. ‘Mais pourquoi tu ne me l’as pas dit?’… J’ai répondu: ‘Parce que c’était une fille’. Cette phrase a fait l’effet d’une bombe. Elle ne se doutait de rien parce que ‘je n’étais pas un garçon manqué, que je n’avais pas un comportement rebelle, je n’étais pas dans la provocation’. Ma mère a vraiment très mal réagi, je suis fille unique et ce n’est pas ce qu’elle voulait, elle m’a dit que ce n’était pas possible, que j’allais changer. C’était une réaction très virulente”.

La fin de certaines amitiés

Après cette annonce, la mère de Lara s’est remise énormément en question, en s’interrogeant sur l’éducation qu’elle avait donnée à sa fille. “Ça a été difficile pour elle durant plusieurs années, mais au fil du temps, elle a accepté. En fait, elle a en quelque sorte dû faire ‘mon’ coming out”, explique Lara. Très vite, la jeune fille s’aperçoit que les réactions diffèrent d’un proche à l’autre. “Du côté de mon papa (mes parents sont divorcés), ça s’est bien mieux passé. Il m’a dit: ‘Je le savais, je le sentais’. Ma mère avait mis au courant ma grand-mère qui m’a tout simplement dit: ‘Je ne veux que ton bonheur’. Ma meilleure amie de l’époque m’a, elle, répondu: ‘Pas besoin de me le dire, je le savais’. Une autre m’a rétorqué: ‘Ah, et elle s’appelle comment?’. Mais Lara a perdu deux amitiés de longue date dans la foulée: ces filles estimaient que Lara avait dû fantasmer sur elles lorsqu’elles passaient du temps ensemble.

Une chose est sûre, après cette étape importante, Lara se sent enfin elle-même. “Faire ce coming out était indispensable. Je devais en parler car je n’étais pas moi-même, je vivais dans le mensonge et je n’exprimais pas qui j’étais. Je suis fière d’avoir été capable d’en parler et d’assumer qui j’étais vraiment”, conclut la jeune femme.

Marie, 24 ans: “Avant de pouvoir faire mon coming out, j’ai dû m’accepter”

Avant ses 21 ans, Marie ne s’était jamais posé la question de savoir quel genre elle aimait. “Lors d’une soirée, une pote m’annonce qu’elle est lesbienne. Et cette révélation m’a fait comme un flash. En fait, je n’avais jamais eu d’exemple de filles qui s’aimaient face à moi”. Choquée et interrogative, Marie se cache derrière des prétextes. “Le lendemain, je me disais que ce n’était pas possible, je remettais ça sur le coup de l’alcool, de l’euphorie de la soirée… Je me suis cachée mes ressentis”, poursuit Marie. “Mais la situation ne s’améliorait pas, je faisais des crises d’angoisse régulièrement. Heureusement, ma meilleure amie a toujours été à mes côtés et m’a tannée avec cette histoire. J’ai voulu savoir d’où venait tout ça et pourquoi cela m’arrivait à moi. Je me suis fait aider par une psychologue parce que je n’arrivais pas à l’accepter”.

Le flash

Avant de faire son coming out, Marie a d’abord mené un long travail sur elle-même. “Entre cette soirée où j’ai compris que j’étais lesbienne et mon coming out, il a dû s’écouler neuf mois. J’en ai d’abord parlé à mes amies qui étaient super contentes pour moi. Elles m’ont toutes prises dans leurs bras et ça m’a fait du bien, parce que moi qui suis très tactile, j’avais peur qu’elles ne veulent plus qu’on se fassent de câlins ou qu’on dorme ensemble”. Ensuite, Marie l’annonce à ses parents, “mais je n’avais pas envie d’une discussion, alors je leur ai écrit une lettre où je leur expliquais pourquoi durant neuf mois j’avais fait n’importe quoi. Parce que j’étais tellement mal, que j’ai arrêté mes études. Ils m’ont directement envoyé un message pour me dire qu’ils avaient bien reçu ma lettre et qu’ils m’aimaient”. Cette nouvelle était un soulagement pour les parents de Marie.

“En fait, à ce moment-là, je n’avais pas besoin de leur aide, c’était à moi d’accepter cette situation”, résume l’étudiante. “Ce qui est dingue dans cette histoire, c’est qu’avant mes 21 ans, je n’avais jamais pensé à cela et quand j’ai eu ce flash, tout m’a paru clair par rapport à certaines situations ou rêves que j’avais pu avoir dans le passé. Je l’ai découvert sans ne jamais rien avoir eu avec une fille, je ne savais finalement pas si j’allais aimer être avec une fille, mais c’était en moi”.

Delphine, 38 ans: “Après un coming out, on se sent libéré”

Delphine a fait son coming out durant sa vingtaine. Avant ça, elle a eu plusieurs relations avec des garçons. “Cette attirance pour les filles est venue vers 19-20 ans, parce que j’étais attirée par une fille. C’est venu comme ça, en une fois. Ensuite, je me suis tue durant deux ans: j’avais des aventures avec des filles, mais personne ne savait”.
Jusqu’au jour où Delphine rencontre la personne qui changera tout. “Il y a 16 ans, j’ai rencontré ma compagne actuelle et je me suis vite dit que c’était la personne qu’il me fallait. J’en ai eu marre de faire semblant, j’ai donc décidé de faire mon coming out. Mais ce n’est pas si facile, on sait qu’on va être sujet à des moqueries ou même des interrogations”. C’est d’ailleurs le cas pour certaines de ses amies. “J’ai eu droit à des questions du style: ‘Tu as déjà été attirée par moi?, alors que mes amies, ce sont mes amies et c’est tout. Ou encore ‘mais que s’est-il passé, un homme t’a fait du mal?’. À côté de ces interrogations, j’ai également perdu des amis. Certains m’ont tourné le dos, ils n’ont pas fait la part des choses”. Delphine a été face à des amis qu’elle découvrait homophobes.

Comme une impression de détruire ses parents

Côté familial, Delphine vient d’une famille très catholique, mais sa mère est ouverte d’esprit. “Pourtant, elle a très mal vécu l’annonce alors que mon père l’a plutôt bien pris. Il n’a pas sauté de joie, mais il s’est dit que c’était la vie. Je pensais que cela allait être l’inverse. Pour ma maman, ça a été une immense surprise. Heureusement, ma marraine (qui est sa sœur) l’a aidée à relativiser en expliquant que je restais sa fille. Ce qui est dur, c’est qu’on a vraiment l’impression de faire du mal à ses propres parents”. Aujourd’hui, la mère de Delphine a complètement accepté la situation et sa compagne est totalement intégrée dans la famille. “Mes neveux et nièces savent que quand ils viennent à la maison, ils vont chez leurs taties”, explique-t-elle, enthousiaste.

“Après un coming out, on se sent libéré d’un poids. Jusque-là, on se dit qu’on doit mentir pour être heureux, on trouve des excuses pour tout. Cela m’est d’ailleurs arrivé de demander à un garçon de m’accompagner à un mariage pour qu’on ne sache pas que j’étais lesbienne. Alors que finalement, on aime juste différemment, mais on n’est pas différente”. Bien que Delphine ait fait son coming out il y a 16 ans, parler de son homosexualité reste une épreuve quotidienne pour elle.

Chantal, 31 ans: “C’est ma mère qui a fait mon coming out”

Durant deux ans, les ami(e)s de Chantal pensaient qu’elle sortait avec un homme parisien de 8 ans de plus qu’elle. “J’ai longtemps appelé ma petite copine ‘Maxime’… J’avais 15 ans, j’étais en 3ème. On s’était rencontrées lors d’un concert d’un célèbre girls band français de l’époque (j’assume d’avoir été fan inconditionnelle des L5!). Nous sommes restées ensemble pendant 2 ans. Une première relation à distance qui finalement m’arrangeait grandement. À cette époque, cheveux courts et look de mec, même si cela ne faisait pas grand doute, je n’étais pas prête à l’assumer aux yeux de tous. Et ‘Maxime’ s’appelait, en réalité, Aurélie”.

Une boule de stress

À l’époque, les parents de Chantal ne sont pas au courant de l’existence d’Aurélie, mais ils ne sont pas dupes, surtout pas sa mère. “Mon coming out s’est fait progressivement. Dans un premier temps auprès de mes proches amies, j’avais 16-17 ans. Avec ma mère, c’est elle qui, en quelque sorte, a fait mon coming out. On était dans la chambre d’amis de sa maison d’enfance. Mon grand-père venait de décéder, toute la famille s’était réunie, la veille de ses funérailles. Il était tard ce soir-là, nous étions couchées, prêtes à dormir lorsqu’elle a voulu aborder le sujet: ‘Marine, c’est plus qu’une simple amie?’. J’ai été surprise par la douceur et la bienveillance de cet échange. ‘Tu sais, tout ce qui m’importe, c’est ton bonheur. Tant que tu es heureuse, je serais heureuse’. Cette boule d’inquiétude et d’angoisse à l’idée d’avoir cette conversation s’en était allée!”.

C’est également la maman de Chantal qui met au courant le reste de la famille. “Elle s’est chargée de l’annoncer à mon père, à mes tantes, puis à mes grands-mères. Heureusement qu’elle était là! Mon père n’est plus revenu sur cela. Il n’aime pas trop ce genre de conversation à cœur ouvert, j’imagine que cela le gêne. Mais j’ai un souvenir de son approbation au détour d’une conversation”, poursuit Chantal.

La copine qu’il fallait?

“J’ai aujourd’hui 31 ans. Je suis très reconnaissante de l’attitude qu’a adoptée ma famille face à mon orientation. Il y a là beaucoup de bienveillance et d’ouverture d’esprit. Même l’une de mes grands-mères, qui pendant 15 ans a pu avoir des mots blessants (‘Je n’avais sûrement pas rencontré le bon’, ‘Il était sain que je pense à me poser dans une vraie relation’, ‘Ce n’était pas sérieux’), l’a finalement accepté aujourd’hui. Je pense que la personnalité de ma chérie actuelle y est pour beaucoup!”, sourit la jeune femme.

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