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Mon enfant souffre de phobie scolaire: que faire?

"Maman, j'veux pas y aller". Qui n'a jamais entendu son enfant prononcer cette phrase au moment de se préparer pour l'école? Mais lorsque l'envie de rester à la maison se transforme en incapacité de franchir les portes de l'établissement, il y a lieu de s'interroger. Ce blocage peut cacher une phobie scolaire.

“Un lundi, vers 9h du matin, quelqu’un a sonné à la porte”, se souvient Angélique, 38 ans. “C’était Leanne, en pleurs. J’ai pensé que notre fille, tout juste âgée de 12 ans, s’était fait agresser ou qu’elle avait eu un accident en chemin. Mais elle a fini par m’expliquer qu’aller à l’école était au-dessus de ses forces. On était mi-octobre. Leanne était en première secondaire. Elle était plutôt bonne élève et avait quelques copines. Nous ne nous étions jamais inquiétés pour elle. Avec le recul pourtant, je sais qu’elle m’avait annoncé la couleur, la semaine de la rentrée, en me disant ‘Je ne me vois pas passer encore 6 ans de ma vie à l’école…’ Je pensais qu’elle blaguait. Mais quand j’y repense, elle avait multiplié les crampes, les migraines et les crises de larmes depuis septembre. J’avais même été appelée par l’infirmière scolaire plusieurs fois. Je n’avais pas pris sa souffrance au sérieux. Mais ce matin-là, j’ai compris que j’étais passée à côté de son immense détresse.”

Qu’est-ce que la phobie scolaire?

Touchant 1 à 5% des enfants scolarisés dans les pays occidentaux, cette pathologie est peu et mal connue. Depuis deux ans, l’enseignante Stéphanie Marigliano accompagne des jeunes de 12 à 20 ans au sein de l’une des implantations de l’École Escale. L’unité de jour dans laquelle elle donne cours s’adresse à des jeunes hospitalisés en décrochage scolaire. Parmi eux, quelques-uns souffrent de “phobie scolaire”: “On entend souvent ‘c’est un caprice’, ‘ça va passer’, ‘il faut les bousculer’; des jugements qui émanent même parfois du corps enseignant. Mais ces jeunes ne font pas semblant. Ils connaissent une souffrance psychique si importante qu’ils sont dans l’incapacité de franchir la porte de leur classe ou même de leur école”.

Si l’expression est plébiscitée par le grand public, les professionnels préfèrent parler de “refus scolaire anxieux”. Le pédopsychiatre Louis Vera s’en explique: “Il ne s’agit pas d’une peur de l’école elle-même, mais, dans la majorité des cas, d’un trouble anxieux. Et plus précisément d’une angoisse de séparation”. Une anxiété qui s’observe d’ailleurs déjà dès l’entrée en maternelle. “L’enfant a peur qu’il arrive quelque chose à ses parents en son absence. Or à l’école, il ne peut pas rentrer quand il veut ou les appeler pour se rassurer, comme il le ferait chez un ami par exemple, ce qui ravive ses inquiétudes ”.

Mais la phobie scolaire peut aussi être provoquée par une anxiété sociale: “ Le jeune est paralysé par ce que l’on peut penser de lui. La peur de commettre un faux pas l’angoisse au point de fuir toute situation potentiellement dévastatrice à ses yeux, comme passer au tableau ou répondre à haute voix en classe. Enfin, l’anxiété peut également provenir d’un stress vécu dans le cadre scolaire (troubles des apprentissages ou de l’attention, difficultés relationnelles, racket, harcèlement scolaire…)”.

Une solution: consulter

Submergé par ses angoisses, l’enfant souffre de nausées, de maux de tête ou de ventre, est pris d’étourdissements, de vomissement, de diarrhée… Des symptômes fluctuants, selon Louis Vera: “Généralement, l’enfant va bien quand il est assuré de ne pas devoir aller à l’école, comme le week-end ou pendant les vacances. Mais à partir du dimanche soir, il recommence à angoisser. Et chaque matin, en semaine, les symptômes reviennent, pour diminuer un peu quand il rentre à la maison et reprendre de plus belle au moment du coucher. C’est alors qu’il faut consulter. Quand on peut encore éviter la catastrophe”.

Car la phobie scolaire est une urgence thérapeutique. Très vite, en effet, elle peut s’accompagner de symptômes dépressifs (repli sur soi, perte de confiance en soi, désintérêt général, comportements autodestructeurs, idées noires…). “Plus l’enfant s’absente de l’école, plus sa réintégration va être compliquée et plus les moyens déployés seront conséquents”. Des gros moyens dont a dû bénéficier Leanne. “Notre médecin de famille, qui pensait à un burn-out, l’a écartée de l’école 3 semaines. La veille de la reprise, elle était tellement mal que j’ai compris qu’il faudrait autre chose. Après diverses consultations, elle a été hospitalisée. Il a fallu 6 mois avant qu’elle ne remettre un pied à l’école, très progressivement”, se souvient sa maman.

Comment se reconstruire?

Stéphanie Marigliano explique: “La plus grande difficulté, c’est que ces jeunes sont cassés de toutes parts… Ils ont perdu confiance en eux, même si la plupart pourraient réussir sans problème à l’école. Dans des structures telles que la nôtre, ils partagent leur journée entre accompagnement thérapeutique et accompagnement scolaire. Nous travaillons les compétences qui se trouvent dans les programmes scolaires, mais de façon moins ‘classique’, plus individualisée. Nous prenons le jeune là où il est, avec ses forces et ses fragilités. L’objectif, c’est qu’il retrouve confiance en lui et en les autres – y compris l’adulte – et qu’il connaisse des petites satisfactions. Par ailleurs, on travaille aussi la socialisation”.

Parce qu’outre les thérapies comportementales et cognitives, une partie importante du traitement repose sur le tissu social. “Il est capital que l’enfant s’entoure un maximum”, confirme Louis Vera. Contrairement à ce que le jeune craint souvent, les pairs réagissent très bien face à l’angoisse d’un de leurs camarades. J’ai vu des enfants de primaire accueillis comme des héros à leur retour à l’école par toute leur classe. Cela aide énormément. Même à l’adolescence.”

Leanne en sait quelque chose. Le mois précédent son retour à l’école, elle a reçu deux fois par semaine la visite de ses copains de classe. Un à la fois d’abord, puis par petits groupes, et enfin tous ensemble. “Elle était très émue”, se souvient sa maman. “J’ai eu peur que ce ne soit trop pour elle, mais quand ils sont partis, elle m’a dit qu’elle avait hâte de les revoir. J’ai compris qu’elle était prête.”

6 gestes à appliquer sans attendre

Votre enfant est dans la même situation que Leanne? Réagissez sans plus attendre!

  1. Discutez avec votre enfant ainsi qu’avec ses enseignants afin de découvrir les causes de cette anxiété: troubles de l’apprentissage, harcèlement, isolement…?
  2. Assurez l’enfant de votre soutien sans dramatiser, il doit comprendre que l’école est une obligation, pas une option.
  3. Montrez-lui que vous lui faites confiance pour trouver une solution.
  4. Faites en sorte qu’il maintienne le contact avec ses camarades de classe.
  5. Consultez un psychologue spécialisé dans les problématiques d’anxiété et/ou les difficultés scolaires.
  6. Informez-vous auprès d’associations dédiées au décrochage scolaire. Le guide social recense les Services d’accrochage scolaire et les Centres de jour pour jeunes en décrochage scolaire. Plus d’infos par ici.

Texte: Marie Bryon/Coordination: Stéphanie Grosjean

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